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Publié le 7 octobre 2015

Une étude publiée par IHS Technology prévoit qu’en 2015 les investissements mondiaux dans les équipements d’infrastructures de réseaux mobiles 4G LTE devraient atteindre un pic de 23,3 milliards de dollars puis décroitre à partir de 2016, ne compensant plus le recul des investissements dans les réseaux d’anciennes générations 2G et 3G, car tout le monde attend la 5G. Dans ce contexte, comment ne pas s’interroger sur le raisonnement des dirigeants de Numericable-SFR qui viennent d’offrir 10 milliards d’euros pour racheter le réseau de Bouygues Télécom, c’est-à-dire trois fois la valorisation de ce réseau par les analystes financiers qui estiment sa valeur entre 3 et 3,5 milliards d’euros?

En proposant une telle somme, que cherchaient les dirigeants de Numericable-SFR ? Des fréquences ? Mais le rachat obligerait l’acheteur à en recéder une partie à Free. Des parts de marché et des comptes clients ? Mais la fidélité des clients n’est plus aujourd’hui une valeur sûre dans ce secteur. En comparaison, le rachat d’Alcatel par Nokia est clairement un plan pour la croissance : peu de doublons dans les emplois (alors que le rapprochement de Bouygues Telecom avec Numericable-SFR amènerait à supprimer près d’un poste sur deux), une grande complémentarité géographique des réseaux (Alcatel très présent en Amérique du Nord, Nokia pas du tout, etc.), un portefeuille de produits assez diversifiés et complémentaires (Nokia exclusivement sur le réseau sans fil, Alcatel majoritairement sur les solutions sous IP). Donc tous les ingrédients d’une fusion qui a du sens et qui peut marcher. A contrario, si l’ambition de Numericable-SFR est de construire un grand groupe français, quels autres acteurs resteraient et comment amortir un tel prix d’achat ? De son côté, l’ambition de Free est de croitre aux Etats-Unis… La question qui se pose donc est: n’assistons-nous pas à la naissance d’une nouvelle bulle dans les télécoms, comme nous en avons vu en 2000 ? En 1999, l’anglais Vodafone fait une offre hostile de rachat des activités de l’allemand Mannesmann pour 117 milliards de livres sterling (environ 180 milliards d’euros). Nous étions en pleine bulle télécoms, les investisseurs croyaient que l’ère du tout-technologique était arrivée, confondant en cela promesses de croissance à moyen terme et rentabilité effective, les taux d’intérêt extrêmement bas pratiqués par le grandes banques centrales facilitaient les OPA et les capitalisations boursières des deux protagonistes étaient devenues délirantes : Mannesmann 119,5 milliards et Vodafone 149,4 milliards (valeurs en 2000). Le crack sur les valeurs technologiques durera jusqu’en 2003. La Bourse de Paris, par exemple, verra ces valeurs dévisser de 65% entre 2000 et 2003 ! Il est intéressant d’observer que, 12 ans plus tard, la capitalisation boursière de Vodafone Group (Vodafone + Mannesmann donc) n’est que de 107 milliards, soit une perte de valeur de 60% ! Autre indice qui fait penser à la naissance d’une bulle télécom liée à l’apparition des problématiques de l’internet des objets, le Mobile World Congress, qui se tient chaque année à Barcelone, a vu sa fréquentation passer de 55.000 participants en 2008 à 95.000 participants en 2015, soit une progression de 73% en 7 ans ! Seul l’avenir nous dira si nous assistons à une nouvelle bulle ou si nous sommes en présence d’une réelle croissance, sans doute tirée par l’explosion du nombre d’objets connectés…

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